Petit à petit,
le grand public commence à comprendre que l’avenir
de notre civilisation se pose avant tout en termes énergétiques.
Augmentation du prix du pétrole, réchauffement climatique,
épuisement des réserves, débat autour du nucléaire
civil… Ces thèmes sont tous présents et liés
dans nos débats, même si nous n’avons pas encore
franchi le pas d’en faire - du moins en France - le cœur
de nos choix politiques. A tort, bien sûr…
Station
solaire brode une trame de polar sur un scénario de
fiction politique qui nous projette dans le futur énergétique
de la terre ; dans ce futur, c’est le Japon qui est devenu
le pays le plus prospère en anticipant l’indépendance
pétrolifère par l’établissement d’une
station transmettant l’énergie du soleil par un train
de micro-ondes. Les Etats-Unis, ayant abandonné leur exploration
spatiale, et l’Europe, déchirée par ses luttes
intestines, sont complètement à la traîne tandis
qu’une guerre religieuse embrase le Moyen-Orient.
La station lancée
par le Japon récupère dans une voilure immense le
flux électro-magnétique du soleil et le transforme
en énergie ; des erreurs de calibrage et de guidage du rayon
lors des transmissions font craindre un sabotage : le commandant
japonais ordonne au responsable de la maintenance américain
de mener une enquête. Au delà des péripéties
de ce huis clos parfait, assez crédibles et bien ficelées,
Station solaire est fascinant par l’aperçu
du futur qu’il laisse entrevoir et qui semble parfaitement
plausible. Je sais que des détracteurs pourraient relever
une vision sans doute partiale et biaisée de la mentalité
japonaise ; mais c’est justement là que l’auteur
se montre plus fin que ce que la description du récit peut
laisser croire.
Eschbach montre qu’individuellement
les généralisations sont de pures absurdités,
mais que les comportements collectifs vont parfois au pire des traits
supposés d’une culture. En plus clair : que l’interaction
sociale renforce les défauts culturels chez des individus
plus tolérants individuellement. Et dans une station fermée,
à l’organisation presque militaire, les affrontements
culturels des membres de l’équipage, issus des antagonismes
des sociétés du monde réel, ressortent évidemment
plus au rapport de force qu'à l’entente cordiale. Le
personnage principal lui-même est en perpétuel conflit,
tiraillé entre son conditionnement social (sa manière
de penser les rapports avec ses collègues sous l’angle
de leurs nationalité et culture respectives) et ses désirs
et besoins individuels d’interaction (dont les trames principales
apparaissent au fur et à mesure de la progression de l’intrigue).
Et donc ce polar spatial
se révèle plus construit et réfléchi
que ce que la quatrième de couverture laisse supposer. |